ART PLASTIQUE ( PEINTURES/GRAVURES )

Jean-Claude VILLAIN ( philosophe) auteur d'une trentaine de livres : poésies, essais, théâtre, nouvelles, livres d'artistes.

                     De quel trefonds , l'artiste tire-t-il la matière de son oeuvre ? De  quels souvenirs, de quels désirs, de quelles souffrances, de quels rêves ? Pour avoir été si souvent posées, et après la psychanalyse être restées encore sans réponse, ces questions ne manquent pas de revenir parfois brutalement à l'esprit devant l'oeuvre de tel artiste.

                   Quand Françoise-Mina Maillard parle de la trace proprement initiatique qu'ont laissée en elle ses séjours à la Vallée des Merveilles, ou bien de sa contemplation des nuits sur la terrasse de sa maison marine, ou encore de son séjour au Danemark, on ne sait pas comment tout cela peut avoir généré ce qu'elle donne à voir, et donc pourquoi au fond elle tient à le citer. C'est que le geste du créateur, comme on sait, n'est pas directement découlé des expériences fortes qui l'ont frappé, mais il procède d'une véritable macération alchimique et porte donc à une métamorphose. Car, oui, nous sommes plus savants que nous le croyons d'abord, et savants de ce que l'humanité sait depuis longtemps; plus ignorants aussi, de cet obscur que nous portons tous, et qu'à force, peu à peu, les artistes révèlent tout en se révélant.

                   Quand Françoise-Mina Maillard construit très finement une longue frise de collages où alternent les images pieuses, elle atteste certes, et par l'ironie aussi, d'une éducation chrétienne, mais au-delà c'est bien entendu tout simplement l'image qui l'intéresse, l'image qui stimule la fantaisie des enfants, les rassure aussi. La période "sacrée" qu'elle parait traverser en ce moment n'est pas celle d'une religiosité sulpicienne mais en renouant avec certains thèmes bibliques, elle présente ( sur bois et le plus souvent en tryptique comme dans la tradition byzantine ) des scènes de la Genèse subtilement enrichies d'un bestiaire onirique ; s'y rencontrent quelques mythes païens de la Méditerranée dégageant une joie sensuelle, laquelle porte à une relecture "naïve" ou filtre l'humour, proche peut-être de l'esprit de certains ex-votos. Et si la beauté des couleurs retient d'abord parcequ'on y sent aussi  le plaisir ludique de l'enfant qui peint, on aperçoit vite combien la liberté du trait y est grande, sans pour autant exclure la force, dans la vigueur à traiter des formes du corps féminin  par exemple, ou dans le rouge qui envahit, comme chez Chagall, tout le corps d'un taureau. Quelle idée de sacrifice suggère alors Françoise Mina-Maillard ? Celle d'une crucifixion où des clous immenses tarauderaient en gris le corps d'une femme ?

 

Extrait d'un livre paru en 2021 "En regardant en écrivant " ed. Orizons

                              

 



23/06/2007
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